Cluny ou la puissance des moines.
Histoire de l'abbaye et de son ordre, 910-1790, Dijon 2001
(= Dossiers d'Archéologie 269/270, Décembre/Janvier 2001/2002)
Inhalt:
- Giles Constable, Cluny avant Cluny. Le legs carolingien
- Dominique Iogna-Prat, L'essor de Cluny aux Xe et XIe siècles
- Marcel Pacaut, Cluny-Cîteaux : une controverse
- Philippe Racinet, Cluny après Cluny
- Denyse Riche, Les abbés de Cluny de la fin du Moyen Age (XIVe-XVe siècle)
- Daniel-Odon Hurel, Cluny entre Réforme catholique et siècle des Lumières
- Jean-Denis Salvèque, La destruction de l'abbaye
- Dominique Iogna-Prat, Cluny au XIXe siècle
- Isabelle Cochelin, L'offrande du quotidien
- Manuel Pedro Ramalho Ferreira, Liturgie et musique à Cluny
- Sébastien Barret, Cluny et son scriptorium (Xe-XIIe siècles)
- Veronika von Büren, La bibliothèque de Cluny
- Didier Méhu, Un monument de l'historiographie clunisienne du XIIIe siècle: Le manuscrit Paris, BnF, Latin 17716
- Catherine Magne, Les reliques à Cluny
- Daniel-Odon Hurel, Cluny entre mythe et réalité
- Daniel Russo, Peut-on parler d'un art clunisien ?
- Marcel Angheben, La sculpture clunisienne
- Juliette Rollier-Hanselmann, Les peintures murales de Cluny III et de Berzé-la-Ville
- Magali Orgeur, Les carreaux de pavement médiévaux de l'abbaye de Cluny
- Anne Baud, L'abbaye de Cluny à travers ses plans
- Anne Baud, La Maior ecclesia de Cluny
- Jean-Denis Salvêque, Les bâtiments conventuels du XVIIIe siècle
- Didier Méhu, Des moines et des morts
- Christian Sapin, Les bâtiments conventuels clunisiens
- Gilles Rollier, De l'eau et des moines
- Kristina Krüger, La galilée clunisienne
- Didier Méhu, Le domaine de l'abbaye de Cluny
- Pierre Garrigou-Grandchamp et Alain Guerreau et Jean-Denis Salvèque, Deux doyennés clunisiens: Jalogny et la Grange-Sercy
- Didier Méhu, Chapelles, églises et paroisses à Cluny au Moyen Age
- Anne Baud, Recherches archéologiques à l'église Saint-Maïeul
- Nadine Roiné, Notre-Dame de Cluny: Découverte de fragments du grand portail
- Didier Méhu, Le bourg abbatial et la communauté d'habitants
- Pierre Garrigou-Grandchamp et Jean-Denis Salvèque, Les maisons de Cluny
- Didier Méhu, Dictionnaire clunisien
Giles Constable, Cluny avant Cluny. Le legs carolingien, S. 2-5
La véritable histoire de Cluny débute un siècle avant sa fondation officielle avec les réformes monastiques associées au nom de Louis le Pieux et de son conseiller Benoît d'Aniane, ainsi qu'avec les décrets du concile d'Aix-la-Chapelle en 816 et 817. Les caractéristiques essentielles de ce programme étaient d'uniformiser les monastères dans tout l'empire carolingien et de les libérer des influences extérieures discordantes. Il établit la règle de saint Benoît comme modèle de vie monastique et régularisa la liturgie en ajoutant une centaine de psaumes environ aux 37 psaumes quotidiens prescrits par la règle. Cluny se différencia de ce programme sur quelques points importants et avant tout sur son lien avec la papauté et sa liberté vis-à-vis de l'évêque diocésain qui ne faisaient pas partie de la réforme carolingienne, mais dans son souci d'uniformité et de structure liturgique, elle adhérait étroitement au programme carolingien.
Dominique Iogna-Prat, L'essor de Cluny aux Xe et XIe siècles, S. 6-11
Le 11 septembre 910 (ou 909), Guillaume III, duc d'Aquitaine et comte de Mâcon, fait don à Bernon, abbé de Baume-les-Messieurs et de Gigny (Jura), d'une villa située dans la vallée de la Grosne, au nord-ouest de Mâcon, pour y fonder un monastère bénédictin placé sous le patronage des apôtres romains, Pierre et Paul. Le lieu a été anciennement occupé et certains historiens téméraires pensent même, mais sans avancer de preuve convaincante, qu'une communauté monastique de femmes y a été installée à l'époque carolingienne. La dotation initiale du duc d'Aquitaine doit assurer l'entretien d'une petite communauté d'une douzaine de moines. Guillaume renonce à tout droit sur l'établissement et place le monastère directement sous la protection de Rome.
Marcel Pacaut, Cluny-Cîteaux : une controverse, S. 12-13
Lorsque, en 1098, un petit groupe de moines, quittant l'abbaye de Molesmes, se fixe à Cîteaux afin d'y observer très strictement la règle de saint Benoît, dans la solitude, à l'écart du monde, en travaillant de leurs mains et en demeurant pauvres en ne possédant ni terres affermées, ni fiefs, ni rentes, ni églises, etc. leur démarche, qui allait s'épanouir en donnant naissance à une quinzaine d'abbayes dans les années 1113-1120 (parmi lesquelles Clairvaux), portait en elle un rejet du monachisme traditionnel et donc de Cluny, même si elle ne s'accompagnait d'aucune critique explicite à leur encontre.
Philippe Racinet, Cluny après Cluny, S. 14-21
La longue période qui s'étend après l'abbatiat de Pierre le Vénérable est négligée ; l'ordre semble incapable de s'adapter aux nouvelles conditions de la vie religieuse. Or, la consultation des archives clunisiennes ne donne pas l'impression d'une perte irrémédiable de vitalité. Dans la mesure où Cluny est un organisme structuré dont les éléments constitutifs, l'ordre, l'abbaye et les prieurés, ne sont pas toujours interactifs, la "décadence" se révèle être une notion réductrice. Les moines ont su s'adapter à des situations variées sans perdre ni leur idéal de vie ni leur place dans la société. Bien entendu, cette place n'est plus celle du XIe s. dans une société qui n'est plus celle de l'époque romane.
Denyse Riche, Les abbés de Cluny de la fin du Moyen Age (XIVe-XVe siècle), S. 22-23
Temps d'épreuves pour l'ensemble de l'Occident, les XIVe et XVe siècles n'épargnent pas Cluny. Si le XIVe siècle fait alterner difficultés et embellies, à partir des années 1370-1380 l'horizon s'obscurcit, Cluny s'enlise dans ses problèmes. Des relations nouvelles se nouent avec les pouvoirs établis : Cluny est de plus en plus manipulé et marginalisé. Assumer la direction de l'ordre s'avère une tâche délicate. De nouvelles figures abbatiales apparaissent, quelques personnalités se détachent mais, malgré leurs efforts, le rôle de Cluny s'estompe.
Daniel-Odon Hurel, Cluny entre Réforme catholique et siècle des Lumières, S. 24-27
Très affaibli par la réforme protestante et les Guerres de religion, l'ordre de Cluny, au XVIIe siècle, est marqué par l'incapacité d'adapter son image devenue mythique d'ordre international à la nouvelle géopolitique des cadres nationaux. Sous l'abbé Louis de Lorraine (1612-1621) et comme chez les cisterciens, prend néanmoins corps une tendance réformatrice qui va susciter, jusque dans les années 1720, des conflits internes entre tenants de l'Étroite observance et les autres, attachés à l'Ancienne observance.
Jean-Denis Salvèque, La destruction de l'abbaye, S. 28-29
La loi du 13 février 1790 supprimait les ordres monastiques en France : elle laissait aux religieux le choix de leur avenir, mais leurs biens communs furent alors confisqués. A Cluny, les moines furent expulsés en 1791, année où une dernière messe fut célébrée le 25 octobre dans la grande église Saint-Pierre-et-Saint-Paul, soit 696 ans après la dédicace de l'édifice.
Dominique Iogna-Prat, Cluny au XIXe siècle, S. 30-33
L'histoire de Cluny au XIXe siècle est celle d'une belle oubliée. Le 12 août 1789, l'Assemblée constituante prend en charge l'Église de France. Commence alors pour Cluny un temps de lente agonie qui aboutit à la disparition de l'ordre. La dernière messe est dite le 25 octobre 1793 et l'abbaye est laissée à l'abandon, les biens du monastère étant placés sous la tutelle de la municipalité. Le 21 avril 1798, l'abbatiale est vendue en quatre lots destinés à servir de carrières à matériaux. Malgré des interventions diverses sous le Directoire et le Consulat, rien n'arrête désormais la destruction de Cluny. En 1809, le clocher du chœur s'écroule. L'année suivante, le grand portail d'entrée est détruit à la mine. Au terme de ce lent travail de destruction, du Cluny roman Cluny III, la maior ecclesia de la Chrétienté latine seuls subsistent les grands et petits transepts méridionaux. Dès lors, il ne reste plus qu'à trouver une affectation à l'espace de l'ancienne abbatiale et spécialement aux bâtiments des XVIIe-XVIIIe siècles qui subsistent. La municipalité les cède à l'État qui y installe un haras, puis, en 1866, une école normale supérieure, lointaine ancêtre de l'École nationale des arts et métiers qui occupe encore les lieux aujourd'hui.
Isabelle Cochelin, L'offrande du quotidien, S. 34-39
Cluny est aujourd'hui perçu comme le monastère occidental le plus important du Moyen Age central du fait de sa richesse, ses bâtiments grandioses, son faste liturgique, le renom de ses grands abbés et son rôle politique de premier plan. Pourtant, à l'époque, son plus grand titre de gloire tenait probablement à son mode de vie. Or, combien savent que sont parvenus jusqu'à nous cinq coutumiers, s'échelonnant entre le début et la fin du XIe siècle, qui décrivent avec une extrême minutie l'existence des moines clunisiens ? Aucun autre monastère médiéval ne peut se targuer d'un corpus aussi riche. Dans les pages qui suivent, j'expliquerai d'abord ce que représentent les coutumiers et à quelles fins ils furent écrits, puis discuterai de ce qu'ils nous dévoilent du mode de vie et de l'idéal de la célèbre abbaye bourguignonne. Les clunisiens avaient réglé leur quotidien de telle sorte qu'ils offraient à Dieu non seulement la perfection de leur service liturgique, mais aussi celle de leurs gestes les plus anodins ; par ailleurs, l'existence de chaque frère était façonnée pour devenir un chemin parfaitement balisé entre l'ici et l'au-delà.
Manuel Pedro Ramalho Ferreira, Liturgie et musique à Cluny, S. 40-47
Cluny était particulièrement renommée pour la rigueur de sa règle du silence et sa liturgie solennelle et verbeuse. Selon les coutumiers de Cluny (applications pratiques et amplification de la règle bénédictine), la vie quotidienne y était entièrement dominée par des services liturgiques : le temps réservé à l'étude ou au travail manuel était, à l'évidence, réduit au strict minimum.
Sébastien Barret, Cluny et son scriptorium (Xe-XIIe siècles), S. 48-53
L'abbaye de Cluny, munie d'une riche bibliothèque, a également produit des livres en son propre sein. L'activité d'un scriptorium, où sont copiés les ouvrages, est difficile à évaluer, surtout dans le cas de Cluny dont les collections ont beaucoup souffert, et ont été au moins partiellement dispersées. Néanmoins, il est possible de reconnaître à un certain nombre de manuscrits encore conservés, le caractère de "manuscrits clunisiens".
Veronika von Büren, La bibliothèque de Cluny, S. 54-55
Nous connaissons la bibliothèque ancienne de Cluny par un catalogue énumérant 570 volumes. Ce catalogue a été rédigé à l'époque de l'abbé Hugues de Semur (1049-1109), probablement dans la dernière décennie du siècle. Il est aujourd'hui perdu. Son contenu nous est transmis par une copie brouillon du XVIIe/XVIIIe siècle dans le manuscrit latin 13108 de la Bibliothèque nationale de France. L'aspect du catalogue original est décrit successivement par quatre bénédictins mauristes qui l'ont vu de leurs yeux aux XVIIe et XVIIIe siècles. De ces descriptions j'ai réussi à déduire l'arrangement et la composition matérielle du catalogue original, et à en reconstituer une maquette.
Didier Méhu, Un monument de l'historiographie clunisienne du XIIIe siècle: Le manuscrit Paris, BnF, Latin 17716, S. 56
Catherine Magne, Les reliques à Cluny, S. 57
Daniel-Odon Hurel, Cluny entre mythe et réalité, S. 58-61
A la fin de l'Ancien régime, Cluny est à la fois une réalité monastique et un nom qui résume un âge d'or, celui de ses premiers abbés. Noyés dans leurs problèmes internes, les clunisiens ne peuvent rivaliser, sur le plan intellectuel et monastique, avec les nouvelles congrégations bénédictines de Saint-Vanne et de Saint-Maur.
Daniel Russo, Peut-on parler d'un art clunisien ?, S. 62-67
Quand on considère Cluny à son apogée, aux XIe et XIIe siècles, on s'aperçoit vite qu'il n'est guère aisé de parler d'un art clunisien. Dans son grand livre sur l'art de Cluny à l'âge roman, l'historien et archéologue américain John Evans avait noté la difficulté, voire l'impossibilité de la tâche et l'avait justement expliquée par l'existence de données fragmentaires, mal datées et le plus souvent contradictoires. Il vaut pourtant la peine aujourd'hui de reposer la question et de rouvrir le dossier d'étude.
Marcel Angheben, La sculpture clunisienne, S. 68-71
La sculpture qui s'est développée dans la grande abbatiale de Cluny se situe au centre d'une évolution artistique qui concerne l'ensemble de la Bourgogne. Elle n'en constitue ni le point de départ ni l'aboutissement, mais son prestige et son influence furent considérables à l'intérieur comme à l'extérieur de l'Ecclesia cluniacensis. Cluny ne semble pourtant pas avoir cherché à imposer à ses abbayes et prieurés une iconographie et une esthétique qui auraient véhiculé une image de son idéal monastique.
Juliette Rollier-Hanselmann, Les peintures murales de Cluny III et de Berzé-la-Ville, S. 72-75
Des peintures de l'abbatiale Cluny III, il ne reste que quelques centaines de fragments, découverts dans les fouilles du chevet et de l'avant-nef. L'activité de l'atelier de peintres peut cependant être étudiée dans la chapelle privée de saint Hugues, la Chapelle-aux-moines de Berzé-la-Ville, et dans un manuscrit clunisien, le "Lectionnaire de Cluny" (B. N., nouv. acq. lat. 2246).
Magali Orgeur, Les carreaux de pavement médiévaux de l'abbaye de Cluny, S. 76-79
Le site de l'abbaye de Cluny offre un rare panorama de presque toutes les techniques de décoration de sols connues et employées à l'époque médiévale : de la luxueuse et riche mosaïque romane aux carreaux de pavement gothiques en terre cuite nettement moins onéreux. Ces différents pavements servent tous à mettre en valeur l'espace qu'ils rehaussent soit par leurs matières, soit par leurs motifs.
Anne Baud, L'abbaye de Cluny à travers ses plans, S. 80-81
Les bâtiments qui subsistent aujourd'hui du monastère de Cluny ne sont que le pâle reflet de l'étendue du domaine abbatial entre le XIe et le XVIIIe siècle. Contrairement à la période médiévale, privée de toute forme de documentation graphique, l'époque moderne bénéficie d'un ensemble de plans et de gravures qui s'avère précieux pour la connaissance du monastère et son évolution. Parmi eux, deux plans sont particulièrement utilisés par les historiens et les archéologues : il s'agit du plan anonyme daté des années 1700 et du plan Philibert fils réalisé en 1790.
Anne Baud, La Maior ecclesia de Cluny, S. 82-87
La Maior ecclesia, le plus souvent appelée Cluny III depuis les travaux de l'archéologue américain, Kenneth J. Conant, constitue à la fin du XIe siècle le chantier le plus prestigieux de l'Occident médiéval. Aucun autre édifice contemporain, aucun autre projet ne peuvent rivaliser avec la troisième église abbatiale de Cluny, uvre de l'abbé Hugues de Semur. Sa construction est intimement liée au développement de l'abbaye qui se situe à l'apogée de l'Ecclesia cluniacensis dans le monde et dans l'Eglise. Les relations privilégiées que l'abbaye noue avec les différents princes d'Europe au cours du XIe siècle et l'appui particulier de la papauté témoignent bien de sa place exceptionnelle auprès des "grands".
Jean-Denis Salvêque, Les bâtiments conventuels du XVIIIe siècle, S. 88-91
A l'instar du mouvement général de reconstruction et d'embellissement amorcé en France à la fin du XVIIe et au XVIIIe siècle, la prestigieuse abbaye bourguignonne, encore abritée dans les vastes bâtiments hérités du Moyen Age, entreprend, vers 1750, la reconstruction de ses bâtiments conventuels.
Didier Méhu, Des moines et des morts, S. 92-95
Depuis la période carolingienne, les moines sont les spécialistes de la commémoration des morts. Cluny emboîte le pas et porte le système à son paroxysme. Associez-vous aux clunisiens, donnez-leur des terres et des hommes, venez vous faire ensevelir auprès de leurs sanctuaires et les chemins du ciel vous seront accessibles. La seigneurie et l'Église de Cluny sont assises sur les morts, et les morts sont au coœur de l'espace monastique.
Christian Sapin, Les bâtiments conventuels clunisiens, S. 98-105
La question fondamentale des types et de l'organisation des bâtiments conventuels de Cluny, modèle possible pour une disposition organisée dans les autres lieux religieux, est d'autant moins abordée que le site éponyme créé en 910 n'a gardé aucune trace de ces premières constructions monastiques antérieures à la fin du XIe siècle. Aussi pour en juger, nous devons faire la part entre les informations issues des textes, de l'archéologie et celles qu'ont imposées progressivement les spéculations intellectuelles et les restitutions graphiques abondantes depuis un demi-siècle, en regard souvent d'un plan idéal de monastère.
Gilles Rollier, De l'eau et des moines, S. 106-109
L'abbaye de Cluny est installée sur une ancienne terrasse alluviale de la vallée de la Grosne. À proximité, les eaux du Médasson, ruisseau canalisé actuellement sous la ville, viennent rejoindre celles de l'affluent de la Saône.
Kristina Krüger, La galilée clunisienne, S. 110-113
Comme les abbatiales de Cluny II et Cluny III, maintes églises clunisiennes étaient précédées d'avant-nefs occidentales surmontées de tours qui sont appellées dans les textes médiévaux des galilées. Souvent d'une longueur de plusieurs travées, ces édifices sont à l'intérieur divisés en deux niveaux. Pendant que le rez-de-chaussée peut s'ouvrir à l'extérieur par des arcades ou former un espace à murs continus, l'étage renferme toujours une chapelle chapelle qui se termine à l'est par une abside dont le cul-de-four surplombant la nef de l'église constitue la caratéristique la plus surprenante quoique pas toujours conservée de ces galilées.
Didier Méhu, Le domaine de l'abbaye de Cluny, S. 114-119
Les moines de Cluny sont des seigneurs. Pour administrer les terres et les hommes qu'ils dominent, ils établissent un réseau de doyennés à partir desquels ils prélèvent les rentes et rendent la justice. Une trentaine d'établissements de ce genre est créée entre le XIe et le XIVe siècle dans un rayon de 50 km autour de Cluny. Granges ressemblant à de grosses fermes, les doyennés ont parfois l'allure de véritables forteresses ou de monastères en réduction. Une diversité qui montre les différentes fonctions du système domanial clunisien.
Pierre Garrigou-Grandchamp et Alain Guerreau et Jean-Denis Salvèque, Deux doyennés clunisiens: Jalogny et la Grange-Sercy, S. 120-121
Didier Méhu, Chapelles, églises et paroisses à Cluny au Moyen Age, S. 122-128
Lorsqu'au XIe siècle une agglomération se forme aux portes de l'abbaye de Cluny, le territoire est progressivement balisé par des lieux de culte dédiés aux saints abbés : Maïeul, Odilon, Odon. Mais le développement des communautés paroissiales et la reconstruction de certaines églises aux XIIe et XIIIe siècles témoignent d'une organisation sociale et spatiale plus conforme aux aspirations des laïcs.
Anne Baud, Recherches archéologiques à l'église Saint-Maïeul, S. 129
Nadine Roiné, Notre-Dame de Cluny: Découverte de fragments du grand portail, S. 130-131
Didier Méhu, Le bourg abbatial et la communauté d'habitants, S. 132-137
Cluny est le prototype du bourg monastique, né ex-nihilo aux portes de l'abbaye, suscité par le mode de vie des moines, encouragé par des privilèges pontificaux qui en font une terre d'asile, dominé fermement par l'abbé et ses lieutenants. L'histoire commence comme un rêve, dans l'harmonie idéale entre les moines et le populus. Mais les intérêts des deux parties tendent vite à diverger, suscitant des conflits durables.
Pierre Garrigou-Grandchamp et Jean-Denis Salvèque, Les maisons de Cluny, S. 138-145
Les études de terrain et les recherches documentaires menées à Cluny depuis 1985 par le Centre d'études clunisiennes, en collaboration avec des équipes britannique et allemande, ont livré une somme d'informations considérable sur l'habitat du bourg abbatial. Elles jettent de premières lueurs sur le paysage urbain au XIe siècle et autorisent un tableau détaillé de l'architecture domestique des XIIe, XIIIe et XIVe siècles.
Didier Méhu, Dictionnaire clunisien, S. 146-150